porta

porta
Daniela Iaria, "Attraverso la porta bianca-fiume", 39x41 cm, 2004.

lundi 5 novembre 2012

Enio Sartori


Enio Sartori, directeur de Trickster, Revue du Master en Etudes Interculturelles de l'Université de Padoue et professeur de Lettres au lycée Arturo Martini de Schio (Vicence), s'occupe des relations entre langues, territoires et migrations, notamment dans le Nord–Est de l'Italie. Parmi ses publications, on citera sa prose poétique Vedi alla voce corpo (Ellemme, Roma, 1989), l'essai d'anthropologie culturelle et religieuse Alla soglia dell'alba. Il Summano e la leggenda di sant'Orso tra mito e storia (Signum, Padova, 2000), le recueil poétique Parole suonate in controcanto (Il Narratore, Padova, 2002) et le travail de critique littéraire sur la poésie de Zanzotto Tra bosco e non bosco. Ragioni poetiche e gesti stilistici ne Il Galateo in Bosco di Andrea Zanzotto (Quodlibet, 2011). Il est également l'auteur des textes en dialecte que nous traduisons ci-dessous, pour l'album musical de Patrizia Laquidara Il canto dell'anguana (Slang Records, Brescia, 2011).



Fais dodo note
de sorcière, chant
qui enchante
câlinerie divine
cantilène berceuse
voix de mégère
langue enjôleuse
emporte-moi

Jaillissent du gouffre
le plus sombre et profond
silhouette et flamme
ivres de danse
oh l’envie
la soif
de la regarder
de la toucher
au moins une fois

elle s’en va, en passant tout près
elle s’en va, elle va ailleurs
fais-la chanter mais laisse-la partir

elle s’en va, elle s’engloutit
et je reste, je reste troublé
fais-la danser mais laisse-la partir

Blanchit la lune, blanchit la laine
elle saute dans l’air, ivre de danse
la vague tourne en une forme magique
pas feutré, elle est un souffle, on dirait


elle s’en va, elle s'engloutit
elle s’en va, elle part dans le vent
fais-la chanter mais laisse-la partir

Fais dodo note de sorcière
chant qui enchante...




La pauvre fille s’émousse
elle s’enlise dans la mémoire
éclabousse, goutte et gâte
et déchire, elle dépasse
elle se glisse madame la guivre
dans la brèche du temps
se frotte soupire et pousse
et glisse la guivre vissée
guivre la basilisse reithia ritiè
anda tiketetanda Tita Tela Tita Te
guivre la basilisse reithia ritiè
anda tiketetanda Tita Tela Tita Te

L’erbe se dénoue et devient salive
la guivre se redresse et s’enflamme
pieds nus elle danse et devient pluie
s’enroule dans l’eau et se dissipe
elle saute dans le vent et va dans l’air
sirène mélusine nymphe sorcière

La pauvre fille s’émousse      
elle s’enlise dans la mémoire
glisse goute et flotte
et remue morte de rire
elle se glisse madame la guivre
dans la brèche du temps
se frotte soupire et pousse
et glisse la guivre sechée.
guivre la basilisse reithia ritiè
anda tiketetanda Tita Tela Tita Te
guivre la basilisse reithia ritiè
anda tiketetanda Tita Tela Tita Te

L’erbe se dénoue et devient salive
et froisse et siffle et éclabousse, elle est 
folle et possédée


trad. Lucrezia Chinellato et Sarah Ventimiglia

© les auteurs et CIRCE